Teaser de juin en Français

Découvrez le teaser de juin où les Olthois ont la part belle...

Le chevalier était vieux, très vieux. Il avait oublié son nom, le jour de la première bataille qu'il avait livrée et jusqu'au premier roi pour qui il avait combattu. Bien que son armure ait été marquée par d'innombrables bosses et entailles, il ne parvenait pas à déterrer un quelconque récit héroïque qui expliquerait l'une d'entre elle. La rouille qui avait profondément attaqué son armure, en dépit des efforts qu'il déployait pour qu'elle reste graissée, était le meilleur indice qu'il avait sur son âge réel.

Et il était fier de cet âge. En l'absence de tout autre preuve, il le considérait comme le témoignage d'une carrière vaillante et couronnée de succès. Pourtant, il se reprochait la rouille. Pour le chevalier, elle signifiait aussi sa lente décrépitude : son pas traînant, ses réflexes ralentis, son incapacité à se souvenir du passé. Sans doute tout ceci résultait-il d'un dévouement insuffisant à ses obligations. Après la patrouille d'aujourd'hui, il avait pris la résolution de s'attaquer à la rouille avec encore plus d'ardeur qu'à l'accoutumée.

Pour le moment, il devait rester concentré sur sa mission. Alors qu'il parcourait de longues galeries obscures, le chevalier observait les décombres éparses et les voûtes effondrées tout autours de lui, en quête d'un quelconque signe de mouvement. A cette profondeur, tout ce qu'il pourrait rencontrer serait un ennemi mortel. Le peuple du roi résidait plus près de la surface, là ou la magie du roi les préservait du danger. Seuls les plus vaillants chevaliers étaient envoyés pour explorer les profondeurs extrêmes du domaine du roi. Du moins, était-ce ce qu'on lui avait rapporté.

Il aurait aimé se souvenir des raisons précises pour lesquelles il était parti en reconnaissance, mais il supposait qu'il les saurait le moment venu.

Le chevalier s'arrêta un instant pour faire appel à son sens de l'orientation. Il se tenait dans un long tunnel décoré par des encadrements vides au bois rongé par les vers et dont les toiles s'étaient depuis longtemps mêlées à la poussière du sol. A intervalles réguliers, des ouvertures débouchaient sur des ténèbres infinies. Le chevalier ne savait pas avec certitude lesquelles conduisaient vers les profondeurs et lesquelles remontaient vers la surface, mais il supposait qu'elles devaient les unes comme les autres être explorées. Pris d'une fantaisie, le chevalier requit sa voix la plus forte et s'exclama : "Qui va là ?" Il n'y eut aucune réponse, mais il se sentait mieux d'avoir fait cette tentative. En fait, il se sentait si agréablement utile qu'il cria à nouveau, d'une voix plus lente et plus sonore. "Qui... va... là ?"

Il se figea, subitement en alerte. Il y avait un léger bruissement dans l'air, comme celui que font les feuilles sèches soulevées par la brise. Cela stimula le chevalier pour des raisons qu'il ne pouvait se rappeler. Empoignant sa flamberge en réprimant son ardeur, il pivota lentement sur sa gauche, puis sur sa droite, essayant de localiser la provenance du son. Tout d'abord, il lui sembla qu'il venait d'une grande voûte fissurée à l'extrémité du vestibule. Puis plutôt de derrière lui. Et finalement il donnait la sensation d'exsuder du sol lui même, le bruissement se muant en une vague de sons continus et claquants...

"Soumettez vous ou vous mourrez !" lança joyeusement le chevalier alors qu'une foule d'Olthoi faisait irruption dans le tunnel depuis toutes les directions. Parcouru par un frisson à la vue de ce déploiement, il en oublia un instant de contre-attaquer. Une pluie de frappe-éclairs de mandibules s'abattit sur son armure et le stupéfièrent, mais l'instant d'après il fendait l'air de sa flamberge, dessinant un arc démesuré, tranchant une douzaine des corps de ces parasites en deux. Après un moment d'hésitation, les insectes déferlèrent à nouveau, l'épée du vieux chevalier taillada sauvagement en réponse, et des membres chitineux volèrent dans toutes les directions.

Le chevalier rit pour lui-même alors que les derniers Olthois reculaient, claquant et sifflant avec colère tandis que des renforts venaient gonfler leurs rangs par l'arrière. Qu'ils viennent ! Sans doute son armure était-elle rouillée, mais sa lame était encore suffisamment affûtée, et son cœur se gonflait d'un sens exacerbé du devoir. C'était après tout la raison d'être profonde d'un chevalier – non pas de parader, de contempler et de crier interminablement, mais de combattre à mort contre une horde implacable !

Il ne se souvenait pas avoir déjà pris autant de plaisir !

 

Lord Sigurd avertit les apprentis qui halaient le tronc sur le pont du Shaper's Quest : "Faites attention... faites attention, à partir d'ici ! Il est irremplaçable !". Quelques uns des plus jeunes enfants lui jetaient des regards noirs, mais les plus âgés des garçons et des filles connaissaient la valeur de la relique qu'ils charriaient sur le bateau, et ils raffermissaient simplement leurs prises. Ils avaient déjà effectué ce genre de tâche de nombreuses fois auparavant.

Albert, l'Ingénieur en Chef de Lord Sigurd, lui fit un signe depuis le pont arrière du Quest. Il semblait inquiet, mais c'était habituel, les Jours de Mise à l'Eau, il ne s'arrêtait jamais avant que les chaudières du Quest ne soient mises en chauffe et que le puissant bâtiment ne se soit apprêté. Sigurd remonta sa robe et se fraya un chemin sur le pont encombré, enjambant d'étincelants instruments, des amoncellements de lingots de fer et d'argent, des piles de riches matériaux, et les autres trésors de la Fraternité qui n'avaient pas encore été mis en cale.

Sigurd salua son vieil ami : "Bonjour, Albert ! Quelque chose de nouveau ?"

L'Ingénieur en Chef entortilla sa moustache grisonnante et fronça les sourcils. "Tout va mal, j'en ai bien peur. Vous savez tout aussi bien que moi que nous ne verrons jamais plus la vapeur sortir de la chaudière de tribord. Nous avons eu de la chance qu'elle n'ait pas mis le navire en pièces quand elle fonctionnait encore."

Bien entendu, ça n'était pas la chance, mais c'est le sacrifice qui les avait sauvés. Un modeste apprenti avait découvert la surchauffe de la chaudière au cours de leur dernière traversée. Se trouvant dans l'incapacité de faire céder la soupape d'urgence, il avait eu recours à une massue pour "l'ouvrir". Cet acte hâtif avait certainement sauvé le bateau, mais l'apprenti avait été ébouillanté par l'explosion résultant. Il avait succombé dans la miséricorde avant la tombée de la nuit.

"Et la chaudière de bâbord ?"

"Elle a toujours été un tas de ferraille, ça n'a pas changé," soupira Albert. "Nous avons lancé trois différents sorts de protection, renforcé les réservoirs avec des plaques de Dramastic (NDLT : un alliage de fer et d'argent), et même forgé une nouvelle tige de piston, mais la réalité est que nous ne sommes pas vraiment capables d'égaler les fabrications des Empyreans. Et il y a aussi les composants magiques – ceux-ci sont une énigme absolue. Si seulement nous disposions de quelques semaines supplémentaires pour l'épontiller..." commença-t-il languissamment.

Sigurd secoua la tête avec impatience. Ceci fait également parti du traditionnel discours d'Albert, le Jour de la Mise à l'Eau. "Tu connais la règle, Albert," le réprimanda-t-il. "Nous séjournons jusqu'à ce qu'un des éclaireurs découvre un Olthoi. Et nous partons trois jours après. Quiconque se trouve alors à terre restera à terre."

"Mais ce n'était qu'un Grub !" se plaint Albert. "A peine plus gros que mon pied. Et il n'y a eu aucun signe des insectes depuis lors. La raison, c'est qu'il était probablement perdu, ou mourant..."

"Trois jours, et pas une minute de plus," répéta Lord Sigurd. Il pointa le ciel en direction de l'Ouest, où le soleil couchant jetait d'obscurs éclats sanguins sur les amoncellements scintillants et les ponts cirés du Quest. "Et le dernier jour touche à sa fin, Albert. Dis au maître d'équipage que personne ne doit quitter le bateau. Et mets en marche la chaudière de bâbord - si elle ne résiste pas à la pression, nous ferions mieux de le savoir au plus tôt. Je vais fermer le Sanctuaire."

"Bien, commandant," soupira Albert. Intérieurement, il se demanda si la dernière chaudière résisterait à la vapeur, ou s'ils finiraient leur trajet jusqu'à leur prochain asile en canot. Et cependant, il ne parvenait pas à regretter leur départ. Il y avait quelque chose d'inquiétant en ces ruines dans lesquelles ils avaient passé l'année à explorer et classifier... quelque chose qui dépassait la mélancolie habituelle dégagée par ce genre d'endroits.

"Soyez prudent, Sigurd !" cria le vieil ingénieur. "Puissiez vous accomplir votre tâche le cœur léger !" Mais le Seigneur de la Fraternité n'entendit pas comme il progressait sur le ponton délabré en direction du rivage.

Poussant un soupir, Albert mit de côtés ses réflexions, il restait encore beaucoup à faire avant que le Quest ne prenne la mer. Il agrippa un jeune apprenti qui semblait désorienté par son travail. "Va trouver Ludward, veux tu ? Nous serons bientôt partis, et je veux qu'il soit paré à s'occuper des éventuels problèmes mécaniques qui se présenteraient."

Et nous n'avons pas non plus besoin que ce vieux fou si brillant s'enfuie à nouveau...

 

Tout était vide et désolé. Il ne restait plus rien dans les pièces autrefois emplies d'agitation à l'exception de la poussière et des déchets. Même le grand hall central ou la Fraternité avait construit sa forge était à nouveau désert, ne restaient que les traces noires laissées par la fumée des âtres, témoignant de l'emplacement qu'elle avait eu. Seules quelques lanternes cassées avaient été laissées, et elles brûlaient faiblement d'une lueur pâle. A chaque fois que la Fraternité quittait une terre d'accueil, les ruines faisaient toujours à Sigurd la même impression : l'abandon et l'amertume. C'était comme une seconde mort pour ces lieux qui étaient restés vides si longtemps.

"Il y a quelqu'un ?" cria-t-il pour le coup en traversant les salles, mais bien entendu, il n'y eut aucune réponse. Tout le monde savait que quand le Quest prenait la mer, il ne revenait jamais, la majeure partie du peuple de Sigurd s'était grandement rapproché du navire depuis l'aube. Finalement satisfait de trouver le camp abandonné, Sigurd s'arma de courage pour aller chercher le plus grand trésor de la Fraternité – le Sanctuaire.

La descente jusqu'à la dernière demeure du Sanctuaire lui prit quelques minutes. Alors que Sigurd empruntait l'escalier précaire et délabré, il s'attacha fortement à résister au rythme pulsant de l'objet. Ca n'était pas quelque chose que l'on pouvait entendre, pas précisément – c'était une sensation dans la poitrine, comme un second battement de cœur. En peu de temps, on marchait, respirait et même pensait en accord avec les battements magiques. L'effet était fortement hypnotique pour les esprits inférieurs. Pour les Olthois, c'était un poison mortel.

Le vieil Esotérique Supérieur, qui avait trépassé peu avant la dernière traversée du Quest avait parlé à Sigurd du Sanctuaire en ces termes :

"C'est à la fois une machine et un talisman. Il y a bien longtemps, lorsque leur race était sur le point de s'éteindre, les Tumeroks ont découvert qu'un certain rythme de percussions rendait les Olthois fous. Cette découverte a sauvé leur peuple. Mais comme tous les insectes, les Olthois s'adaptent rapidement, et ils ont appris à ignorer ce rythme élémentaire. Le Sanctuaire, néanmoins, transmet un rythme similaire aux alentours du Portalspace."

Il est dix fois plus nuisible pour ces insectes qu'un simple rythme de tambour – il déchire leurs esprits. Mais ils s'adaptent. Ils évoluent. Si vous apercevez ne serait-ce qu'un Olthoi à moins d'une quinzaine de kilomètres de votre camp, cela signifie qu'ils ont appris à refouler le battement du Sanctuaire. Il ne vous reste plus alors qu'à fuir ou périr.

Et c'est par ce moyen que la Fraternité a survécu. Pendant des générations ils ont parcouru les vastes contrées d'Auberean, se frayant un chemin au travers des cendres de la magie et de la technologie des Empyreans. Ils avaient retrouvé d'innombrables artefacts inestimables, et Sigurd pensait qu'aujourd'hui ils avaient surpassé les anciens dans l'art de forger des armes et des armures. Mais ils étaient toujours incapables de comprendre parfaitement les puissantes machineries du Shaper's Quest, l'étrange navire autopropulsé trouvé par l'arrière-arrière-grand-père de Sigurd. Cette découverte fortuite avait délivré la Fraternité des dangers des continents, en faisant des nomades désespérés qu'ils étaient, des érudits et des rois.

Si le dernier moteur du Quest rendait l'âme, qu'adviendrait il de la Fraternité ? Seraient-ils condamnés à fuir éternellement les Olthois, redevenant nomades à nouveau ? Ou pire, que se passerait-il si le Sanctuaire lui-même s'épuisait ? Plus jamais ils ne pourraient débarquer, car comme tout un chacun le savait, plus aucune terre n'était vierge du fléau des Olthois. Et aucun être humain ne pourrait subsister avec seulement des biscuits de mer (NDLT : biscuits de survie utilisés par les marins et préparés à partir de 4/5 de farine et 1/5 d'eau) et de rares poissons pêchés. Le scorbut était une façon bien âpre de mourir.

Lord Sigurd atteignit enfin le caveau ou il avait dissimulé le Sanctuaire six mois auparavant. Il prit en tâtonnant le trousseau de clés à sa ceinture, saisi par un sentiment de malaise grandissant. Quelque chose n'allait pas, il le savait. Il n'arrivait juste pas à mettre le doigt dessus.

C'est alors qu'il comprit. Il n'avait pas encore ressenti le battement du Sanctuaire.

Aussitôt, il sortit avec empressement la bonne clé et l'introduisit dans la serrure – qui se révéla après coup de pas être verrouillée. La porte du caveau pivota sans difficulté sur ses charnières, et Lord Sigurd vit alors deux choses qui le glacèrent d'effroi.

Un érudit décontenancé se tenait à proximité du socle du Sanctuaire, semblant tout à la fois embarrassé et singulièrement fier.

Et il y avait le Sanctuaire – démonté, mis en pièces, détruit. La corde d'argent tressée au bout de laquelle avait été autrefois suspendu le cristal résonnant était irrémédiablement emmêlée, l'ossature en bois de Deru brisée en éclats, et le cristal lui même nulle part en vue.

"Qu'avez... vous... fait ?" hurla Sigurd tout en s'avançant vers le misérable inventeur.

Le visage de Ludward rayonnait de joie. "J'ai réussi au delà de nos plus folles espérances, Lord Sigurd ! Plus jamais nous n'aurons à nous soucier des Olthois ! J'ai utilisé le cristal du Sanctuaire, et il s'est révélé comme étant précisément la source de pouvoir qu'il me fallait..."

Au Diable ce que vous évoquez, Ludward ! Nous parlerons de votre jouet plus tard ! Depuis combien de temps avez-vous détruit le Sanctuaire ?"

"Détruit ?" Ludward sembla offensé. "Je ne l'ai certainement pas détruit, Sigurd. Je l'ai utilisé pour mener à bien des expériences." Remarquant la fureur dans les yeux de Sigurd, il ajouta précipitamment, "Bien qu'il soit vrai que j'ai débuté mes expérimentations il y a, disons, deux semaines de cela ?"

"Deux semaines ? Si vous ne parvenez pas à faire marche arrière sur vos essais avant que les provisions du Quest ne soient épuisées, je vous donnerai en pâture aux requins." Constatant l'effarement de Ludward, Sigurd se retint de poursuivre ses menaces. "Rassemblez les pièces et partons. Deux semaines ! Nous aurons de la chance si nous arrivons à temps au bateau.

"Oh... oui... les éléments. C'est intéressant que vous les évoquiez. Je veux dire, la plupart se trouvent juste là." Il fit un geste en désignant la pagaille sur le socle. "Mais le cristal, je l'ai emprunté..."

Il semblait sur le point d'en dire d'avantage, mais Sigurd l'en empêcha d'un signe de la main et Ludward devint silencieux. Le Seigneur de la Fraternité sonda attentivement le silence durant un moment. Puis il dégaina sa longue épée, une arme splendide, qu'il avait lui-même forgée et enchantée. Il doutait qu'elle fût toujours aussi efficace.

Ludward se racla la gorge. "Vous comprenez, nous devons descendre pour trouver le cristal, mais..."

"Il est trop tard, Ludward. Les Olthois sont ici." Comme pour confirmer ses dires, un sifflement vibrant commença à filtrer à travers la pièce. Sigurd s'échauffa en faisant quelques passes avec son épée, et balaya alors brutalement les débris du Sanctuaire sur le sol. Le vieil érudit commença à protester.

"Non, Ludward. Vous ne réparerez plus rien. Et où que se trouve le cristal à présent, il y restera. Nous sortons d'ici."

"Mais, mon Seigneur," commença Ludward, "si seulement vous m'écoutiez..."

"A trois, j'ouvre cette porte. Et nous commencerons à courir tous les deux. Nous ne nous arrêterons pas tant que nous n'aurons pas atteint le Sharper's Quest. Si l'un de nous deux tombe, l'autre continue de courir. Vous avez bien compris ?"

            "Mais, Seigneur !"

            "Un... deux..."

 

Alors qu'il gisait agonisant, Sigurd résolu que son plan aurait fonctionné s'il avait lui-même suivi son propre conseil.

Une fois qu'il avait ouvert la porte du caveau, il s'était trouvé face à un Olthoi Moissonneur qui avait atteint sa maturité – un adversaire mortel pour trois solides guerriers, et bien davantage pour deux vieillards aidés d'une épée magique. L'Olthoi avait semblé aussi surpris que Sigurd quand son premier coup d'estoc glissa entre les plaques chitineuses, transperçant un organe vital et tuant la créature sur le coup. Sigurd n'avait jamais réalisé qu'un Olthoi avait des organes vitaux. Et bien, l'arme de la Fraternité jouait en sa faveur.

Alors Ludward et Sigurd se mirent à courir pour sauver leurs vies, leurs robes battant follement derrière eux. Au début, il leur sembla qu'il serait facile de s'échapper des catacombes. Ils affrontèrent quelques Grubs et une Nymphe bourdonnante, mais Sigurd se débarrassa de ces insectes immatures avec assurance. Et alors qu'il maudissait cette cachette sans valeur, il vit que Ludward venait de s'arrêter en chemin !

"Attendez... n'avez-vous pas entendu une voix ? Si ! C'est lui ! Restez là – je vous rapporte votre cristal !"

Et Ludward avait dévalé les escaliers comme fou, ce que, Sigurd s'en fit la réflexion, il était certainement. C'est à ce moment que Sigurd aurait dû retourner au navire. Mais le charme du cristal était puissant – avec, ils pourraient peut-être créer un nouveau Sanctuaire. Et il ne voulait tout simplement pas laisser son vieil ami derrière lui.

Quand il avait rattrapé Ludward dans une réserve abandonnée, l'érudit était retranché dans un coin, hurlant sans conviction à un trio menaçant de Moissonneurs. L'attaque enragée de Sigurd avait séparé la tête d'un Olthoi de sa carapace, et blessé mortellement un deuxième avant même qu'il eut pu réagir. Mais le troisième avait été trop rapide pour qu'il puisse parer ses lames, et l'une de ses pattes acérée comme un rasoir avait transpersé l'abdomen de Sigurd de part en part. C'était un coup mortel, et Sigurd le savait.

De quelque manière que ce soit, Sigurd n'avait jamais compris comment ça avait été possible, Ludward avait bondi sur le dos de la créature et l'avait étranglée à mains nues. A mains nues ! Il avait tenu bon jusqu'à ce que l'Olthoi titube, hurlant et martelant la carapace de la créature et creusant avec ses ongles dans les interstices, et finalement l'insecte était tombé et avait cessé de bouger. C'était la chose la plus cocasse qu'il avait jamais été donné à Sigurd de voir, et une fameuse histoire à raconter si quiconque survivait.

Sautant sur ses pieds, Ludward s'écria, "Restez ici ! Je ramène de l'aide !" Et il avait disparu à nouveau.

La vue de Sigurd s'obscursissait. Il ne lui restait sans doute pas longtemps à vivre. Mais quand la silhouette d'un immense Noble Olthoi se dessina dans l'encadrement de l'ouverture, atteignant facilement deux fois la taille de tous les parasites qu'il avait pu affronter jusqu'alors, Sigurd saisit la poignée de son épée avec une joyeuse détermination. C'était un adversaire valable pour lui donner une mort honorable. Il vacilla sur ses pieds, pressant d'une main son flanc saignant et fendant l'air de l'autre.

"Tu cherches un casse-croûte ? Dis moi, de quoi vous nourrissez vous, vous les Olthois, d'ailleurs ? Il semblerait que vous ayez tué tout ce qui n'était pas Olthoi jusqu'à présent. Et je ne fais moi-même pas exception." La créature émit de petits cris surpris, puis fit un pas décidé en direction de l'homme mourant.

"C'est ça... approche toi. Est-ce que tu as une pensée propre ? Ou es-tu juste une extension de ta Reine, comme un os ou un ongle ?" Chancelant, Sigurd s'apprêta à lancer son assaut final.

Sigurd avait toujours espéré que la mort serait troublante et surprenante. Son père lui avait dit une fois, "La Mort se présente aux hommes sous d'étranges apparences," et Sigurd y avait cru. Mais il n'avait jamais imaginé que la Mort ferait irruption sous la forme d'un géant mécanique rouillé. Il ne s'était non plus jamais attendu à ce que la Mort s'exclame, "Salutations ! Soumettez vous ou vous mourrez ! Longue vie au roi ! Victoire et Honneur !" Et il était complètement déconcerté lorsque la Mort plongea son épée massive (n'était-ce pas supposé être une faux ?) profondément dans le corps du Noble Olthoi désorienté, qui fut prit de soubresauts et mourut instantanément. Sigurd eut un doux sourire alors que Ludward descendait du dos de la Mort et se précipitait à ses côtés.

"Comme ça, la Mort vous a aussi trouvé ? Plutôt non-conventionnelle, vous ne trouvez pas ? Peut-être que si l'on passe sa vie à travailler avec des machines, c'est une machine qui vous emporte quand le temps est venu... c'est assez approprié, vraiment..." Sigurd chancela, puis s'effondra dans les bras de son ami.

 

"Ainsi vous avez détruit le Sanctuaire et risqué nos vies à tous pour construire un Gear Knight ?"

"Et bien, je n'aurais jamais pu en construire un en partant de rien. Pas par moi-même. Mais j'ai trouvé une ancienne carcasse dans les étages inférieurs et je me suis dit, 'Ludward, voilà la solution à tous nos problèmes.' Une armée de Gear Knights ! Ca a bien marché pour nos ancêtres..."

"Qui ont tous été tués ou chassés, je vous le rappelle."

"Comme je viens de le dire, cela à fonctionné pour nos ancêtres, et ça fonctionnera pour nous. Les Gear Knights n'appartiennent même pas à la technologie des Empyreans – ils sont d'une grande simplicité comparés au Quest, par exemple. Il est tellement dommage que vous n'ayez pas laissé mon premier succès mettre le pied sur le bateau. Il vous a sauvé la vie, après tout."

Un bâtiment flottant n'est pas un lieu pour une machine à tuer sénile d'une demi tonne, Ludward. Même si elle a le sens de la chevalerie."

"Ca n'est pas grave. Je suis persuadé de pouvoir en construire un autre. A vrai dire, peut-être même que je pourrais leur enseigner comment construire leurs semblables ! Ils éradiqueront bientôt les Olthois d'Auberean, attendez et vous verrez."

Effrayé, Sigurd prit péniblement appui sur un de ses coudes. Le mouvement oscillant du Shaper's Quest le rendait légèrement malade, et sa blessure le faisait encore diablement souffrir.

"Qu'ils construisent leurs semblables, hein ? En voilà une idée, mais... Vous ne ferez rien d'inconsidéré, n'est-ce pas, Ludward ?"

Ludward rassura le Seigneur de la Fraternité : "Bien sûr que non, seulement quelques expériences, rien de plus."

Provenant d'en dessous les ponts, un grand bruit résonna d'un bout à l'autre du navire, suivi d'une voix rouillée beuglante, "Hey là ! Qui va là ! Du vent vous, canaille ! Où est mon armure ?"

Sigurd haussa les sourcils en regardant Ludward. Ludward grimaça légèrement. "Vous aviez bien dit mettre le pied sur le bateau, mon Seigneur..."

"Vous avez gardé la tête ?"

"J'ai gardé la tête."

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